Troisième opus de ce groupe phare de la scène black metal actuelle de Suède, Sworn to the Dark marque un certain détachement pour le groupe comparativement à ses deux prédécesseurs. Pour ceux qui ne connaissent pas du tout, mentionnons que Watain joue un black metal cru très mélodique, aux influences directes provenant de Mayhem (surtout de l’ère où Dead était au chant, dont Erik s’est directement influencé pour son apparence et son jeu de scène), de Celtic Frost, de Darkthrone et autres suspects de convenances (par exemple, le riff de guitare qui débute à une minute dans Legion’s of the Black Light semble sortit tout droit d’un album de Carpathian Forest) et de Dissection, ce qui est très évident sur ce nouvel album. En effet, plusieurs moments forts de Sworn To The Dark portent la signature que l’on connaît à Dissection au niveau du jeu mélodique de la guitare (voir l’excellent riff de Satan’s Hunger à 2 :38 ou le passage a 5 :14 de The Serpent’s Chalice). Rien d’étonnant quand on sait que Erik a été musicien de session pour Dissection, que son album favori de 2006 était justement Reinkaos de Dissection et que Watain a participé à la dernière tournée de Dissection l’an dernier. Sur cet album, Erik a une voix plutôt rauque, mais assez articulée pour qu’on puisse saisir la majorité des textes (anecdote, un des textes fut écrit par Belfagor d’Ofermod et un autre par Set de Dissection), et le groupe se tient souvent dans un tempo modéré pour ensuite pouvoir y aller d’une session de « blast », ce qui donne encore plus de force à ces passages. Ceux qui connaissent déjà le groupe ne seront pas déstabilisés, mais certains changements se doivent d’être mentionnés.
Il me semble sur de dire que Sworn to the Dark est un exercice compétent et de haut calibre dans le domaine du black metal satanique : cependant le constat principal auquel on en arrive est que cet album n’est pas aussi convaincant que Casus Luciferi, l’album précédent. Par souci de pouvoir rejoindre un public plus grand avec cet album, Erik (chant/basse), H.(batterie) et P.(guitare) ont pris la décision de polir, de donner de la puissance à la production et Erik a minimisé les réflexions théolo-philosophiques pour joindre à ces nouvelles pièces des textes plus dénudés au niveau des figures de styles académiques.
Le son plus clair et professionnel de Sworn to the Dark a plusieurs avantages : la clareté des instruments est la bienvenue (spécialement pour entendre le jeu de batterie de H.) mais une certaine agressivité fut perdue en cours de route. Est-ce dû à la production ou tout simplement à cause des nouvelles compositions elles-mêmes? Car il faut mentionner que les pièces souffrent d’un problème majeur : elles sont un peu trop longues (quelques-unes allant jusqu'à 7-8 minutes) et elles s’essoufflent en cours de route. La ou Casus Luciferi et Rabid’s Death Curse étaient victorieux, c’était par la solidité des pièces : leur aspect direct, sans superflu. Ici certaines pièces s’étirent ce qui fait perdre en partie à Watain la conviction profonde qui semblait animer leur violence sonore.
L’album est tout de même de très grande qualité et beaucoup plus accessible que les deux précédents et mérite qu’on s’y arrête, et ceux et celles qui désirent un bon album de black metal ayant une production décente n’ont plus à chercher. Comme nous n’aurons malheureusement pas la chance de voir Watain en sol canadien cette année, voici une raison de plus de donner une écoute a cet album. Excellent black metal de haut calibre autant au niveau de la présentation visuelle (mettez la main sur la version vinyle ou digipack, ça en vaut la peine) que sonore, mais provenant de Watain qui avait mis la barre très haute avec Casus Luciferi, on s’attendait à plus.