Desolation est le titre du troisième album de Khemmis, jeune formation américaine de doom metal (mélodique) en provenance de Denver, Colorado. Sorti à peine il y a quelques semaines, il fait suite à Hunted sorti en 2016 et Absolution, leur premier album, qu'ils ont présentés en 2015. Nous avions eu la chance de discuter avec Phil Pendergast, leader du groupe, lors de leur spectacle à Montréal (dans le cadre du Decibel Tour) plus tôt cette année et au cours de la conversation, il nous racontait que pour Absolution, il n'avait eu que cinq jours de studio tandis que pour Hunted, quelque chose comme quatorze jours. Effectivement, Absolution, qui est un excellent album lorsque l'on prend ceci en considération, est plus 'raw', très direct et très doom. Sur Hunted, Khemmis nous ont présenté quelque chose d'un peu plus raffiné tout en demeurant fidèle à un doom mélodique avec comme ligne directrice des riffs efficaces et des mélodies vocales qui se posent en harmonie avec les guitares. Pour Desolation, Phil racontait avoir plus de temps de studio et être très excité par la sortie future de l'album, qui à son avis serait plus heavy, citant des influences death metal et qui s'inspirant de King Diamond. C'est dans ce contexte et avec ces éléments en tête que nous attendions la sortie de l'album d'autant plus, il faut le préciser, que Khemmis génère beaucoup d'attentes considérant que Hunted c'était retrouvé dans des positions de choix de différents classements lors de sa sortie en 2016.
Allons-y donc avec un classique 'track by track' pour ce Desolation qui compte 6 chansons. Juste avant, il faut mentionner la qualité de la pochette (format cd sous la main) qui est franchement réussi. Le 'artwork' est impressionnant. Dès les premières notes de Bloodletting, on reconnait aisément le son de Khemmis et bien sûr, la voix de Phil est très mélodique, plaquant les riffs de guitares qui sont doom avec un petit côté hard rock. Dans le refrain, Phil pousse sa voix davantage de ce qu'il nous avait montré jusqu'à présent. Le solo de guitare se pose sur un riff agressif au tempo augmenté. Ben Hutcherson, l'autre guitariste qui assure les voix 'death' dans Khemmis, nous introduit un vocal plus proche du black metal qu'auparavant. C'est bien réussi. Bloodletting aurait pu figurer facilement sur Hunted. C'est donc un choix judicieux pour ouvrir l'album. Le deuxième titre, Isolation, est plus court (moins de cinq minutes) que ce à quoi Khemmis nous a habitué. On devine que cette décision n'est pas étrangère au fait que cette chanson fait office de 'single'. C'est une pièce qui groove beaucoup, rien de trop agressant ici, on est axé sur les mélodies et elles font étrangement penser à ce que la Finlande nous a habitué en terme de métal mélodique. Ça surprend un peu venant de Khemmis, mais le jeu de batterie permet de garder le tout quand même proche du doom metal. Au final, ce n'est pas mauvais du tout, cette chanson devrait très bien passer en concert. On poursuit avec Flesh To Nothing. C'est ici que Khemmis nous surprend agréablement et que l'on découvre la personnalité de l'album. On débute avec un riff lourd assez rapide tandis que le refrain est lent et très mélodique. La voix de Phil est superbe. Un passage plus agressif aux influences black metal suivra plus tard et la voix de Ben est à nouveau plus proche du black que du death. Il faudra donc s'y habitué, mais après quelques écoutes ça passe vraiment bien. Somme toute, sur Flesh To Nothing, Khemmis nous offre une dose d'originalité. Le quatrième titre, The Seer, nous plonge dans un autre univers avec des riffs très lourds. C'est la chanson probablement la plus doom de l'album. Encore une fois, on a droit aux vocaux death/black de Ben lors d'un passage avec une bonne transition vers quelque chose de plus doux et mélodique. Et ça revient doom mais avec un tempo plus accéléré. C'est bien réussi. Man Of Time débute sur un riff furieux avec un jeu de batterie très lourd et un vocal mélodique. Le refrain est hyper accrocheur et heavy. On y alterne les vocaux de très belle façon. Le solo de guitare est excellent. La finale est vraiment intéressante avec des notes de guitares ouvertes et une batterie déchaînée pour déboucher sur quelque chose provenant d'outre tombe avec un chant qui fait réellement peur. Un autre titre solide. La dernière pièce, From Ruin, est l'une des meilleures de l'album, sinon la meilleure. Ça débute sobrement avec un vocal hyper mélodique sur un tempo assez lent. Il s'en suit le refrain construit d'un riff foutrement solide... un riff à la Tony Iommi rien de moins. Lorsque Phil chante 'Give me the strength to carry on' s'est à lever les poils tellement c'est épique. Un passage doux avec un vocal mélodique précède un solo sur un riff lourd et plus rapide. On poursuit avec un chant encore plus haut, rarement avons nous entendu Phil être si haut, et ce fameux refrain pour la finale. Difficile de ne pas dire bravo pour cette créativité.
Franchement, avec Desolation, Khemmis marque son terrain. Avec trois albums en quatre ans ils sont parvenus à développer une identité qui leur est propre. On reconnait leur signature très personnelle sur tous les titres sans exception. Ça demeure du doom metal mais aux multiples influences que ce soit hard rock, métal progressif, heavy mélodique finlandais ou black metal. Les deux premières chansons (qui demeurent très bonnes) enlèvent toutefois un peu de lustre à l'originalité de Desolation. Elles auraient pu aisément se retrouver sur Hunted. D'un autre côté, elles permettent de faire la transition entre les deux albums car les quatre dernières pièces sont originales à souhait, très relevées et d'une grande créativité, qui vont au delà de ce qu'on a entendu sur Hunted. Si vous l'avez apprécié ce Hunted, vous allez adorer Desolation qui est encore plus abouti à tous les niveaux. Décidément, Khemmis est sur la bonne voie.
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