Fort de leur récente signature avec le très reconnu label métal Nuclear Blast, le groupe québécois Augury nous propose son deuxième album, intitulé Fragmentary Evidence. Cinq ans après l’excellent Concealed, force est de constater qu’Augury n’a pas seulement répété la formule, mais l’a également approfondie. Leur musique death metal progressive, teintée d’accents black metal ou encore d’influences classique ou jazz par moments, mérite amplement le qualificatif « extrême » accolé à ce type de métal. Plus complexe, plus progressif, plus détaillé, nous avons ici en Fragmentary Evidence une œuvre accomplie et cohérente. Le groupe, toujours composé de Patrick Loisel (guitare et voix), Mathieu Marcotte (guitare) et Dominic « Forest » Lapointe (basse), a accueilli récemment en son sein le batteur Antoine Baril, mais c’est tout de même Étienne Gallo qui a enregistré la batterie sur le disque. Notons aussi la présence de nombreux invités qui prêtent leur voix aux compositions d’Augury, comme Sven De Caluwé, Éric Fiset, Sébastien Croteau, Syriak et Leilindel, Youri Raymond et Filip Ivanovic.
Les pièces présentes sur l’album sont variées, bien que toutes liées entre elles par ce qui les caractérise le plus, c'est-à-dire le mélange d’agressivité brute et de subtilité, de technique poussée et mélodies lyriques. Presque tous les morceaux passent effectivement très souvent des riffs de death technique accompagnés de blast beats aux mélodies éthérées et envoûtantes. L’ouverture, Aetheral, est une charge brutale presque du début à la fin, agrémentée d’un passage plus mélodique et d’un solo de basse. Simian Cattle est pour sa part un bon exemple de l’aspect très progressif de la musique d’Augury, passant d’une intro à la basse fretless à un death metal plus conventionnel avant de se lancer dans un passage expérimental et de finir avec un mélange entre vocal clean et rauque, sur un fond mélodique. Orphans of Living et Jupiter to Ignite suivent, toutes deux comportant des parties acoustiques fort bien travaillées. Les prouesses techniques des musiciens s’enchaînent sans répit, ce que certain pourraient décrier, car cela brise parfois le rythme. Or, c’est tout de même quelque chose de très bien intégré dans ce genre de musique où les riffs peuvent changer à chaque mesure, et le niveau de ces mêmes musiciens nous fait plus souvent apprécier à juste titre les sons qu’ils tirent de leurs instruments respectifs.
Sovereigns Unknown, la pièce suivante, met en valeur d’intéressantes harmonies vocales ainsi que de la voix « quasi-clean ». La présence des deux membres d’Unexpect apporte une touche différente, que l’on retrouve avec plaisir sur Brimstone Landscapes, alors que la folie inhérente à leur musique semble insufflée dans le morceau d’Augury. Les très intenses Skyless et Faith Puppeteers, que l’on retrouvait sur le promo que le groupe avait fait paraître en 2006, sont probablement parmi les meilleures pièces de l’album. Il est toutefois difficile, aussi fou que cela puisse paraître, de classer l’album par pièces, celles-ci étant tellement riches, changeantes et complexes que chacune forme un tout. Malgré cela, l’album demeure cohérent, guidé par un fil conducteur autant musical que littéraire, alors que les textes, très intéressants soit-dit en passant, demeurent autour de thèmes souvent philosophiques, théoriques ou traitant de l’existence, autant empirique que métaphysique.
Conclut par l’excellente et longue Oversee the Rebirth, laquelle regorge de détails jusqu’à créer un amalgame musical très réussi, l’album laisse une impression de densité et de technicalité extrême. La fusion entre les différentes influences (par exemple, plusieurs passages font beaucoup penser à des groupes comme Opeth) et les différents styles utilisés s’opère très bien alors que le résultat est un disque d’une grande qualité, tant au niveau musical qu’au niveau de la production (remarquable, vu le genre de musique, alors que tous les instruments et les parties sont audibles et bien balancées). En bref, Augury semble ici être un groupe au sommet de sa forme, et cela tombe à point, avec la conquête des scènes internationales qui s’amorce.