Pour un groupe actif depuis 1993, qui de plus a à son actif six albums, Adorned Brood est relativement peu connu, du moins pour ce qui est du Québec. Comment se fait-il, dira-t-on? Un seul moyen de le savoir, c’est d’écouter leur matériel, afin de déterminer si cela en vaut la peine.
Le groupe allemand récidive donc pour une sixième fois avec l’album Noor, leur drakkar flottant comme toujours sur les eaux du folk metal. Fort d’une formation plutôt traditionnelle (deux guitares, voix, basse, batterie et claviers), Adorned Brood y ajoute une flûtiste et chanteuse, ce qui donne du caractère à leur musique; après tout, que serait le folk metal sans les fameux instruments traditionnels ? Au fil de l’écoute, il est possible d’entendre aussi accordéon, violon et orchestre, ceux-ci étant fruit du synthétiseur, mais tout de même réussis (par exemple, l’introduction de l’album, épique à souhait avec son orchestre, rappelant les bandes-sons de films fantastiques). Cet aspect épique est d’ailleurs très présent sur Noor, alors que les riffs de guitares lourds et plus souvent qu’autrement rapides alternent avec les chœurs de voix clean, la voix féminine et les passages de flûte endiablés, qui soit dit en passant sont un des points forts de cet album, Anna Ingeborg se révélant être une flûtiste de talent. Pour ce qui est de la voix, elle est très typique du folk, bien que le growl du chanteur s’approche pas mal d’une voix de death ou même black metal.
Malheureusement, ce qui semble être une formule gagnante ne réussit pas totalement à nous emmener dans une contrée lointaine où règnent des dieux nordiques: sans être mauvaise, la musique d’Adorned Brood ne se détache pas du lot en termes d’originalité. Mis à part quelques titres, nous avons toujours l’impression qu’il manque quelque chose pour que l’on apprécie pleinement les chansons, bref, que l’album ne vient pas nous chercher. Celui-ci débute pourtant en force (Storm) avec un morceau entraînant, puis poursuit avec Am Grunde Des Meeres, à l’intro folk réussie et à la mélodie rehaussée de touches traditionnelles, mais tout de même soutenue par un riff efficace. Si l’on n’accroche pas avec Sons of the Damned, ordinaire, l’excellente pièce titre avec ses guitares harmonisées à la viking metal, son jeu de batterie agressif et ses mélodies à la flûte et aux chœurs est sans contredit la meilleure de l’album. Il est dommage que malgré cela, les autres pièces soient moins dignes de mention. Quelques bons coups, des musiciens visiblement en contrôle et expérimentés, mais peu de moments qui retiennent notre attention. Adorned Brood et Schiff Der Toten sont plutôt rapides et rappellent souvent le death mélodique, alors que Trollmelody et Under Yggdrasil sont plus décousues et lentes. L’album se conclut sur Drunken Sailor, peu originale, dont la comptine traite, vous l’aurez deviné, d’un marin bien saoul.
Bref, il serait difficile de dire que Noor est un mauvais album, mais il ne marquera assurément pas les amateurs de folk metal. La musique est bonne, mais peu originale, les arrangements sont très corrects, mais ne réussissent pas à faire lever le tout. Le disque mérite amplement une écoute (ou même plusieurs), mais il manque à Adorned Brood un peu plus de vent dans les voiles de leur navire afin qu’ils se frayent un chemin dans les créneaux déjà fort occupés du folk metal.