Dans le monde encombré du Death technique, il peut être difficile de tirer son épingle du jeu et de se démarquer des innombrables groupes qui semblent lancés dans une course aux armements effrénée, toujours plus techniques, plus brutaux et plus rapides. Beyond Creation, qui peut compter dans ses rangs le talent et les 6 cordes de Dominic « Forest » Lapointe, réussira-il à sortir du lot et à offrir quelque chose de nouveau au genre? Il serait vain d’essayer de vous cacher la réponse …
Dès l’écoute des premières notes de l’album, on est impressionné par la production, qui se situe très haut dans les standards déjà exigeants du Tech Death. Tous les instruments sont parfaitement audibles (y compris bien sûr la basse fretless de Forest) et interagissent harmonieusement sans jamais faire de l’ombre aux autres. C’est particulièrement heureux car dans cet album, les solos n’en sont jamais réellement, tant les performances de chaque membre sont remarquables et travaillées.
S’il y fallait un mot pour résumer les compositions du groupe, ce serait sans doute l’harmonie: les pièces parviennent à mêler des influences multiples et des ambiances très variées sans jamais décevoir au niveau technique, mais sans non plus sombrer dans la démonstration de virtuosité. Passages brutaux, mélodiques, planants et accrocheurs s’enchainent sans efforts, et l’écriture est si fluide qu’il est inconcevable de s’ennuyer un seul instant: aucun riff ne semble trop long ou mal placé, et chaque note sonne juste. Il est particulièrement ardu de prendre parti pour une pièce plutôt qu’une autre, mais The Deported remporte sans aucun doute une palme avec ses 11 minutes d’orgasme auditif.
De même, chaque musicien semble plus talentueux que les autres : les guitares sont fluides, avides de tappings complexes et de solos époustouflants, la basse se détache très souvent des guitares et exploite pleinement les possibilités de la fretless, et la performance du batteur se situe parmi les meilleures que j’ai eu le plaisir d’entendre, tout genre confondu. En ce qui concerne le chant, le growl de Simon Girard n’a rien de foncièrement original, mais il est parfaitement exécuté et accompagné par une riche variété d’agressions vocales en scream, shriek et même quelques inhales bien placés.
The Aura est-il donc irréprochable? On serait tenté de le dire. Mais au-delà des qualités incontestables de sa production, de sa composition et de son interprétation, cet album apporte un son audacieux et inattendu au genre, en fusionnant des influences de multiples horizons pour forger une expérience artistique unique. C’est un premier album, mais c’est aussi un chef d’œuvre, et il ne nous reste plus qu’à attendre la suite.