Depuis maintenant quelques mois, le nom de Grimoire circule un peu partout dans la scène Métal québécoise. En effet, le projet solo de Fiel, connu pour sa participation dans Forteresse et Csejthe, a su attirer l’attention par le mystère que le protagoniste a laissé planer autour de sa création. Comme il le dit si bien : ‘’ […] tout ce qui a à savoir sur l'album est sur l'album […]’’. C’est donc avec une hâte hors du commun que j’ai inséré le disque dans mon lecteur après plusieurs longues semaines d’attente. Allons, ouvrons ce livre magique pour en analyser son contenu.
La première chose qui vient aux oreilles lors de l’écoute d’ ‘’à la lumière des cendres’’ est le caractère unique de la musique de Grimoire. Plus précisément, tout en étant dans un registre Black Métal, cette dernière expose un côté mythique qui me fut rarement possible d’observer. En effet, chaque pièce impose une intensité impressionnante tout en ayant un côté lugubre et apaisant à la fois. Cette atmosphère est en grande partie causée par une douce mélodie qui vient hanter l’auditeur et qui s’incruste jusqu’au plus profond de son âme. Contrairement à plusieurs autres formations, l’expérience est à la fois guidée par la guitare, qui crée une base stable, et cet air de clavier/piano qui occasionne un contraste délectable avec la puissance des autres instruments de l’ensemble.
Dans le même ordre d’idées, musicalement parlant, le premier opus de Grimoire est tout simplement un délice. À la batterie, Fiel démontre toute l’étendue de son talent. Ceux qui l’ont déjà entendu performer avec un autre groupe sauront de quoi je parle. Il guide admirablement la cadence de chacune des pièces en variant entre les rythmes déchaînés et les passages plus sombres. De plus, son instrument est presque placé en avant-plan, ce qui permet à l’amateur de saisir chaque détail de sa performance. À la guitare, comme discuté précédemment, le protagoniste principal ne joue pas dans la dentelle, mais instaure des mélodies extrêmement fiables et originales à la fois. Pour une fois, l’instrument à cordes n’est pas la pièce centrale de l’offrande et je vous dirais que je trouve cette décision rafraîchissante et innovatrice à la fois. Aux vocaux session, Morne, ancien chanteur de Csejthe, fait une intéressante apparition. Je parle ici d’’’apparition’’, car sa performance se veut quelque peu effacée. En effet, il surgit dans de temps à autre pour y livrer les textes dont je discuterai un peu plus tard. Sa voix hurlante et vigoureuse est couplée avec une ambiance caverneuse, ce qui donne l’impression qu’il est enseveli loin derrière. Finalement, tel qu’abordé un peu plus tôt, Fiel manie le piano avec brio. Il se permet même de l’utiliser comme instrument principal à une occasion, ce qui vient en quelque sorte tempérer le tempo avant de repartir de plus belle. J’avouerai que c’est un peu bizarre de dire cela dans une critique de Métal Noir Québécois, mais l’utilisation de cet instrument est sincèrement mon coup de cœur. Il emmène l’auditeur dans une pure transcendance dans laquelle il fait bon s’abandonner pendant l’expérience que propose Grimoire.
Dans un autre ordre d’idées, je ne peux passer sous silence la qualité des textes qui composent l’offrande dont il est présentement question. Le talent des compositeurs québécois à créer des paroles d’une grande profondeur est indiscutable et c’est encore une fois le cas pour ‘’à la lumière des cendres’’. Ces dernières viennent appuyer le côté obscur et sinistre de l’album de belle manière. Par ailleurs, la dimension physique de l’opus est aussi une réussite. La couverture, créée par Philippe D’Amours est tout simplement sublime et les illustrations de Moribond sont sans reproche.
En résumé, avec sa première œuvre, Grimoire a su me charmer et je suis convaincu qu’il fera de même avec chacun de vous. Même après maintes écoutes, je suis toujours aussi obnubilé par le côté énigmatique d’ ‘’à la lumière des cendres’’. Évidemment, venant de Fiel, je m’attendais à quelque chose de bon, mais j’étais loin de me douter qu’il allait pondre une telle merveille. Sans plus tarder, je vous laisse aller explorer cet ouvrage profond et prenant.
Je haletais
Le visage engourdi par les blessures
Et les pieds noyés par le sang
Je suffoquais,
Les yeux mouillés d’espoir
Le corps rongé d’angoisse