Connu et reconnu pour son travail avec Emperor, Ihsahn est maintenant une légende vivante du Black Métal. Depuis quelques années, il investit son énergie dans son projet solo portant son nom qui se situe à mi-chemin entre le métal extrême et le progressif. L'opus qui se veut le sujet de la présente critique est son troisième effort pleine longueur d’une trilogie initiale. Habituellement avec l'ancien guitariste d'Emperor, il est difficile d'avoir des attentes claires, car sa musique est toujours en constante évolution. Encore une fois, il s’est allié à Asgeir Mickelson, qui est considéré comme le batteur officiel de la formation. Par ailleurs, Lars Koppang Norberg s’est joint à eux pour jouer la basse. À noter que cette sortie est la toute première composée à l’aide d’une guitare à huit cordes. Saura-t-il surpasser les standards qu’il a lui-même imposés aux fils des années?
Dès la première écoute, une innovation majeure se fait vite entendre. En effet, tout au long de l'expérience, un saxophone manié par Jorgen Munkeby raisonne haut et fort dans plusieurs pièces, voire la majorité. Il est évident que les puristes seront répugnés par cet ajout d'autant plus que sa présence est plus que discrète. Par contre après plusieurs auditions, je trouve qu'il prend de plus en plus de sens. Plus précisément, le saxophoniste joue d'une manière débridée et agressive, ce qui ajoute une dimension chaotique très rafraîchissante au matériel présenté. En effet, il n'apporte aucune mélodie et n'ajoute rien à celle orchestrée par la guitare et la voix, mais son apport se veut tout de même intéressant malgré l’effet de surprise lors de son entrée en scène. De plus, sa sonorité n'et pas aussi propre que dans un jazz-band et les overblows sont multiples.
Dans un autre ordre d'idées, Ihsahn fait preuve d'une intéressante maturité. Certes, sa maîtrise de la musique extrême n'est plus à prouver, mais dans cet effort, il l'agence à merveille avec son côté progressif. Il ne mélange pas nécessairement les styles, mais la balance entre ces derniers est tout à fait adéquate même s'il garde une tendance vers la brutalité. En effet, le meilleur exemple se situe dans la pièce ‘’A Grave Inversed’’ qui ne va pas sans rappeler les belles années d’Ihsahn au sein d’Emperor dans toute la violence dégagée sans pourtant ressembler à du True Norwegian Black Metal. Malheureusement, son plus grand point faible se trouvé sur son côté doux. En effet, à mon humble avis, ses parties à saveur progressive ressemblent un peu trop à ce qui se fait déjà (ex: Opeth) sans pourtant tomber dans la spirale des balades langoureuses à n’en plus finir. Par contre, il est sur une bonne piste et il saura sans aucun doute peaufiner son art dans le futur, si son projet ne se limite pas à une seule trilogie. Un autre point qui mérite d'être discuté est l'habileté d'Ihsahn à composer de la musique de qualité. En effet, aucun instrument ne fait sentir qu'une certaine redondance s’est installée et qu'un espace devait être comblé. Les riffs de guitare sont des plus originaux et l'impression d'écouter deux fois la même pièce ou le même passage ne se fait pas ressentir.
En résumé, After est un album qui, selon moi, se retrouvera dans la catégorie des indispensables de 2010 même si la nouvelle année est à peine débutée. Certes, certains éléments font de ce disque une expérience moins accessible que les deux premières offrandes d'Ihsahn, mais ceux qui adorent découvrir et se lancer sans filet dans un univers plus que spécial seront ravis de ce que le génie derrière Emperor a à offrir. Ce dernier n'est pas encore rendu jusqu'au sommet de la perfection, mais s'en approche dangereusement.