Depuis 2007, le nom de Gorgoroth n’a cessé d’être sur les lèvres des amateurs de Black Métal. Il fut le personnage principal d’une saga judiciaire et médiatique qui fit rapidement le tour du globe. C’est en mars dernier que cette dernière prit fin, laissant un goût amer pour certains et créant une joie intense pour les autres. Peu de temps après que le verdict ait été annoncé, le seul membre original de la formation s’entoura d’anciens collaborateurs et de légendes de l’industrie pour concocter l’album dont il sera question. Plus précisément, il recruta Pest (1995-1997) aux vocaux, Tormentor (1996-2002) à la guitare, Frank Watkins (Obituary) à la basse et Tomas Asklund (Dissection) à la batterie. Depuis ‘’Incipit Satan’’ en 2000, Infernus ne s’est pas vraiment investi à la fois dans la musique et les paroles de son propre groupe. C’est à se demander s’il n’a pas perdu la touche neuf longues années plus tard…
Dès les premières notes de ‘’Quantos Possunt ad Satanitatem Trahunt’’, quelque chose d’inattendu vient tout de suite sauter au visage de l’auditeur. En effet, la vitesse globale des pièces composant l’effort est plus lente si on la compare au travail antérieur de Gorgoroth, sans toutefois sacrifier un brin d’intensité. À la première écoute, il peut sembler déroutant ou même décevant de faire face à ce nouvel aspect. Par contre, plus l’album s’imprègne dans la dimension psychique de l’amateur de Black Métal, plus il prend tout son sens. Pour son grand retour, Infernus a décidé d’œuvrer dans un type de musique un peu plus raffiné qu’à l’habitude. Ceux qui se plaisaient à se faire mitrailler de tous les côtés du début à la fin d’un opus resteront perplexes. Heureusement, ce qu’offrent les Norvégiens n’est pas tout blanc ou tout noir. Certes, l’expérience se veut plus tranquille par moments, mais les origines de la formation sont toujours bien présentes et le style unique du membre fondateur du groupe ressort énormément.
Musicalement parlant, le fait que le leader n’ait pas collaboré énormément dans un processus de création depuis presqu’une décennie n’est peut-être pas une si mauvaise chose. En effet, ce dernier ne nous offre pas du réchauffé ni une sauce diluée, mais plutôt un concentré de qualité digne des classiques qu’il a créé dans le passé. Plus précisément, à la guitare, le protagoniste principal met en scène des mélodies d’une originalité impressionnante ayant quelques airs de famille avec les albums cultes du bon vieux temps. À noter que son compatriote Tormentor n’a pas participé à l’enregistrement, car il rejoignit le groupe alors que tout était enregistré, mais il y participera activement dans le futur. À la basse, Frank Watkins vient supporter l’ensemble musical de belle façon même s’il ne se retrouve pas à l’avant-plan. À la batterie, Thomas Asklund fait un travail sans reproche. Il alterne aisément entre les blast beats et les rythmes un peu plus diversifiés. De plus, la finesse de son jeu fait en sorte qu’il vient apporter une toute autre dimension à l’ensemble instrumental. Finalement, concernant la partie vocale, le tant attendu Pest revient en force et reprend la barre de Gorgoroth de façon exceptionnelle. Sa voix crasseuse coupante, putréfiée et coulante transpose à merveille toute la noirceur et le satanisme présent dans les textes de la formation. Il est sans aucun doute le meilleur chanteur de l’histoire de cette dernière.
En résumé, le quintet de Bergen revient en force avec un opus plus que solide qui viendra assurément reconquérir les amateurs des premiers disques et qui charmera quiconque a un intérêt marqué pour du Vrai Black Métal Norvégien. ‘’Quantos Possunt ad Satanitatem Trahunt’’ vient prouver qu’Infernus a encore l’inspiration pour créer du matériel de qualité supérieure et la volonté pour ramener son projet sur le droit chemin après la débandade mise en œuvre par Gaahl et King Ov Hell. Il s’est entouré de gens qui ont un talent immense et l’investissement de ces derniers dans le projet transparaît. Il n’y a pas à dire, le sombre personnage cornu vivant sous terre doit être très fier de ses fidèles.